Rock Anti Capitaliste
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 'La Haine'? La peine...

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H.N.
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H.N.


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Date d'inscription : 12/10/2010

'La Haine'? La peine... Empty
MessageSujet: 'La Haine'? La peine...   'La Haine'? La peine... EmptyMer 7 Déc - 2:37

La Haine, Mathieu Kassovitz, 1995


Hubert est noir. Hubert est gentil. Hubert fait de la boxe. Hubert a arrêté le cannabis (même s'il en trafique), mais il se remet à fumer à cause des gamins de la cité qui ont brûlé la salle de boxe (mais c'est pas de leur faute, c'est les méchants flics qui ont blessé le gentil Abdel). Hubert est le sage de la bande.

Saïd est maghrébin. Saïd est gentil aussi, même s'il dit des gros mots et qu'il insulte la police. Saïd ne ferait pas de mal à une mouche.

Vince est juif. Il a un bon fond mais comme il est blanc, il a les vices des Blancs: l'agressivité, l'impulsivité, une tendance à agir avant de réfléchir. Heureusement que Hubert est là pour le calmer (et à la fin pour le venger).

Astérix est blanc, et en plus il prend de la coke. Le cannabis c'est cool, pas grave, ça fait rigoler et voir des vaches. Mais la coke c'est dangereux, ça rend fou et agressif. Y a que les bourgeois blancs qui prennent de la coke (comme Astérix, qui en plus a une arme à feu et doit de l'argent à Saïd). Les jeunes de cité ne touchent pas à cette merde. Astérix provoque les trois amis alors qu'ils ne lui ont rien fait. Ensuite, il les jette dehors sans rembourser l'argent qu'il doit à Saïd.

Les flics sont méchants. Ce sont des tortionnaires qui harcèlent les jeunes de cité qui se baladent tranquillement dans la rue. Ils leur prennent leur shit pour le fumer. Ils boivent pendant leur service, surtout pendant les séances de torture des gardés à vue. Vince voudrait entrer en guerre contre eux, mais heureusement que Hubert le sage est là pour le calmer. Sauf que les flics sont méchants et qu'ils continuent à provoquer les gentils jeunes jusqu'à la fin, lors de laquelle Hubert le sage finit par perdre son calme. Salauds de flics.

Les Blancs sont racistes parce qu'ils ont peur, comme celui qui sort la tête des chiottes après la discussion avec l'ancien déporté. C'est pour ça qu'ils deviennent violents comme les flics tortionnaires.


Vous vous demandez ce que je raconte? Tout simplement un résumé de La Haine. Tout le film est comme ça: déballage de clichés sur la banlieue, alors qu'il a la prétention de dénoncer ces clichés. Kassovitz enchaîne les contradictions:
- quand le trio arrive à Paris intra-muros, Saïd est frappé par la politesse des flics. Dès qu'ils sortent de l'appartement d'Astérix, ils se font contrôler par une patrouille. Alors, les flics intra-muros sont plus gentils que ceux de banlieue ou pas?
- le trio est montré comme des victimes (la scène de torture du commissariat, qui oscille entre le navet mal joué et la malhonnêteté intellectuelle pure et simple - ceux qui ont déjà mis le pied de gré ou de force dans un commissariat peuvent en juger). Pourtant, dès qu'ils en ont l'occasion, les 3 jeunes se comportent comme des oppresseurs à leur tour: lors de l'exposition d'art contemporain, lorsqu'ils attrapent un méchant skinhead d'extrême-droite...
- le trio est montré comme des victimes, mais aussi comme des abrutis incultes et provocants. On a souvent l'impression que le scénariste se fout de la gueule des jeunes de cité, tant les dialogues (qui ne sont pas foncièrement mauvais à la base) semblent parodiques. Exemple: "c'est quoi Thoiry?"
- le receleur n'est pas content de se faire brûler sa voiture, comme s'il faisait partie des "habitants des cités qui travaillent honnêtement mais sont victimes de la violence des jeunes"...

Kassovitz n'arrive pas à trancher entre drame tragique (Abdel à l'hôpital, qui finit par décéder; final digne d'un film noir, qui laisse sous-entendre que la situation en banlieue est désespérée) et comédie parodique (échanges de petites vannes, ridicule volontaire de certains dialogues ou de certaines scènes, comme celle de la tondeuse..). Du coup, il mélange les deux, et le mélange est forcément indigeste: il ne parvient ni à faire rire, ni à faire pleurer.
L'anecdote de l'ancien déporté dans les toilettes rappelle les origines juives hongroises de Mathieu (fils de Peter) Kassovitz. Kassovitz, ce brave bobo fan de cinéma décalé et arty comme son père, qui fantasme une union des Juifs, Noirs et Maghrébins contre les méchants Blancs racistes - sauf que l'affaire de la séquestration cruelle d'Ilan Halimi par le gang des barbares de Youssouf Fofana en 2006 a démenti cette utopie délirante, donnant un brutal coup de vieux à ce film sorti en 1995, et le dépouillant de ses prétentions de contestation sociale pour ne lui laisser que le côté bobo et arty décalé.

Du reste, Kassovitz se contredit jusque dans ses prises de position. Il exprime ses doutes sur la version officielle des avènements du 11 septembre 2001, mais pourrait-il tolérer qu'on puisse exprimer de tels doutes sur le génocide des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale? Passés maîtres dans l'art du double discours, les bobos sont toujours empétrés dans leurs positions contradictoires qu'ils maquillent à défaut de s'expliquer.

Le film est basé sur un double mécanisme systématique: la provocation qui entraîne une réaction. Ainsi, si les jeunes de cité sont énervés contre la police, c'est parce que la police a grièvement blessé leur pote Abdel. Si un Noir tire sur un physionomiste, c'est parce que ce dernier ne l'a pas laissé rentrer en boîte. (Par contre, bizarrement, c'est le trio qui provoque les skinheads d'extrême-droite, mais c'est le trio qui l'emporte en séquestrant le skin joué par Kassovitz).
Il s'agit très exactement du même argumentaire que la manipulation/culpabilisation antiraciste. D'ailleurs, Kassovitz ne se cache même pas, puisque lors de la scène de l'escalator, cet argumentaire est explicité (le Français moyen de souche cause de tous les maux, salaud raciste et collabo). Avec le recul, on ne sait pas si Kassovitz a fait ce film pour dénoncer le fait que les "jeunes de cité" reproduisent les comportements oppressifs que la société soi-disant raciste leur ferait subir, ou juste par pure complaisance démagogique. Dans tous les cas, il s'agit de surfer sur un phénomène de société, en accentuant le côté spectaculaire, en restant léger pour éviter une réflexion trop lucide, et surtout en évitant toute analyse sociale/raciale de profondeur. Le problème racial est justement esquivé par une naïveté caricaturale et manichéenne façon pub pour Benetton.

Que dire du choix des acteurs? Certains de ceux qui jouent les flics (à part Philippe Nahon) ne sont pas crédibles: Zinedine Soualem dans le rôle du flic tortionnaire raciste (bien sûr), assisté par Bernie Bonvoisin avec ses cheveux longs et son bonnet... Est-ce une comédie, une tragicomédie, une parodie tragique?
Des trois acteurs principaux, seul Taghmaoui semble naturel. Vincent Cassel surjoue, il est ridicule quand il s'énerve tout seul, prend l'accent de banlieue et prononce des jurons en arabe. On voit très bien que ni lui, ni Hubert Koundé ne viennent de ce milieu, même s'ils se forcent à en adopter les mimiques et les codes de langage. Karin Viard fait ses débuts dans une apparition brève mais correcte.

Le film a aussi un côté "la banlieue a du talent": quand on voit le DJ Cut Killer mixer, la scène de breakdance, les tags filmés en gros plan... Une opération de promotion (pseudo) artistique, en quelque sorte.

La scène de fusillade suivie d'une échauffourée entre policiers et "jeunes de cité" est particulièrement mal jouée, elle ressemble à un exercice de répétition des forces de police. Bizarrement, dans ce film, quand un personnage se fait tirer dessus, il se contente de tituber en se tenant le bras ou la tête... (Détail intéressant: le gérant de l'épicerie est asiatique, comme dans le début de Menace II Society.)

Attention, il ne s'agit pas d'un ratage total. Le film est distrayant et comporte quelques bonnes scènes, ou du moins pas trop mauvaises: l'anecdote de l'ancien déporté, l'exposition d'art contemporain, quand Vince braque le skin et hésite à le tuer... De plus, le personnage du flic d'origine maghrébine, considéré comme un traître dans la cité, aurait pu être intéressant s'il avait été creusé.

Bref, il s'agit d'un film idéologique qui avait pour double but de populariser l'argumentaire antiraciste développé par les officines du PS et de promouvoir la sous-culture hip hop. Le recul historique nous permet de savoir que l'argumentaire antiraciste était basé sur le mensonge et la manipulation, et que les acteurs et producteurs de ce film ne sont pas originairement liés au milieu hip hop de banlieue, sur lequel ils se sont greffés par opportunisme. Dans l'ensemble, La Haine a assez mal vieilli, sachant que c'était déjà un film techniquement et qualitativement médiocre à sa sortie. Plus réaliste et implanté dans un terreau d'acteurs choisis sur le terrain, Ma 6-T va crack-er le surpasse sur tous les plans.
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