Rock Anti Capitaliste
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 - This is England -

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H.N.
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H.N.


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MessageSujet: - This is England -    - This is England -  EmptyVen 16 Déc - 9:20

This is England
Shane Meadows, 2006


Attention, cette critique dévoile des moments-clés de l'intrigue

Depuis les années 2000 sévit dans la sous-culture punk un revival skinhead associé à la mode rétro-rock'n'roll. Cette tendance s'associe bien évidemment à une mythologie révisionniste qui vise à mettre en avant les racines soi-disant multiculturelles du mouvement skinhead (le fameux spirit of '69, communion fantasmée des rudeboys jamaïcains et des prolos anglais blancs sous la bannière du ska et du Trojan reggae), et à assimiler l'image du skinhead nationaliste/néo-nazi/raciste à une entreprise de récupération de la part de l'extrême-droite. Dans cette mythologie, il y aurait d'un côté les skinheads fidèles aux origines, fans de reggae, antiracistes et fiers d'être issus de la classe ouvrière, et de l'autre, les skins d'extrême-droite rebaptisés 'boneheads' (terme péjoratif d'invention récente), qui auraient trahi les fameuses racines multiculturelles du mouvement. Tout ceci pourrait soulever de passionnants débats, allant du ska au National Front en passant par les mods et leurs scooters, mais tel n'est pas le sujet de ma chronique.

This is England sert clairement la soupe à la mythologie du skinhead originellement antiraciste devenu raciste et nationaliste à cause de quelques manipulateurs fêlés, enfonçant le clou que le documentaire Skinhead Attitude avait déjà planté. Le film se présente donc comme une fiction fortement inspirée de faits réels, avec une dimension autobiographique (le réalisateur a côtoyé le mouvement skin dans sa jeunesse) et sur fond de chronique sociale. Tâchons donc de l'analyser objectivement, en tenant compte de ses objectifs et des résultats obtenus.

Le film ne manque pas d'atouts: la trame de fond de la guerre des Malouines, la représentation crue d'une classe ouvrière frappée de plein fouet par la crise, la description assez réaliste des rapports amicaux en termes de fidélité/trahison... À titre d'exemple, la rivalité - notamment pour l'amour de Lol - entre Combo et Woody est intéressante, et bien plus fine que la présentation des rapports entre les autres membres de la bande - mais nous y reviendrons. Le film comporte également un bon suspense avec des rebondissements inattendus. Enfin, les scènes de discours de Combo et du dirigeant du National Front sont émouvantes et convaincantes, car elles montrent bien la collusion au cours des années 80 entre une classe ouvrière blanche colportrice de valeurs morales (loyauté, camaraderie, travail, patriotisme...) et un nationalisme anglais nostalgique de la grandeur passée de l'Empire britannique, en opposition à la politique libérale cynique et brutale de Margaret Thatcher (symbolisée par le soldat à la jambe mutilée que l'on voit lors des extraits documentaires de l'introduction). Voilà pour les atouts du film.

Passons maintenant aux défauts, et la liste risque d'être plus longue. Le film souffre globalement d'une vision assez caricaturale et de la grossièreté des ficelles qu'il emploie pour démontrer ses idées. Pour schématiser, on a droit au début au cliché des gentils skins à la panoplie vestimentaire complète qui s'amusent innocemment sur fond de reggae (façon pub pour Levi's et Doc Martens) puis, suite à la scission de la bande, à celui des méchants skins ratonneurs sur fond de punk. La bande sonore fait preuve d'un manque cruel d'inventivité, ainsi que de cohérence: les skins écoutaient certes du reggae, mais les années 80, c'est l'explosion de la oi!, du chaos punk et du RAC. Pourtant, aucune trace de ces trois sous-genres dans la BO, à par le "Warhead" des UK Subs (pur groupe de punks) avant la scène de la réunion du National Front.

La même division caricaturalement binaire est appliquée aux personnages. Par exemple, le héros Shaun se tape Smell (la clone de Siouxsie), pendant que le gros méchant Combo se prend un rateau par Lol (qui est en couple avec Woody, vous savez, le gentil skin apolitique qui veut juste boire de la bière et fumer des joints avec ses potes en écoutant du ska et de la soul). Division binaire entre les deux groupes (les gentils apos et les méchants fachos), dont certains membres comme Puke passent de l'un à l'autre sans qu'on comprenne exactement les causes de leurs hésitations.

Beaucoup d'autres éléments de l'intrigue restent mystérieux: le motif de l'incarcération de Combo (qui dit avoir casqué pour Woody), le pétage de plombs final de Combo... La série-séquelle de quatre épisodes This is England '86 aurait pu éclaircir ces mystères, mais elle a choisi de se pencher sur le passé d'autres personnages. Tout ceci ne plaide pas en la faveur de la vraisemblance du film, qui pèche par sa naïveté et son parti pris politique - sur lequel la ridicule fin ne laisse planer aucun doute.

Passons au jeu des acteurs. L'acteur principal qui incarne Shaun n'est pas complètement convaincant, sans manquer foncièrement de crédibilité. Il faut dire que la naïveté de l'intrigue (sa facilité à s'intégrer dans une nouvelle bande, ainsi qu'à séduire Smell qui, par son aspect physique et sa taille, semble beaucoup plus âgée que lui) ne l'aide pas. D'autres rôles plus secondaires comme celui de Lol (qui sera mise plus en avant dans la série-séquelle) sont brillamment exécutés. Par contre, l'acteur qui joue Combo (un méchant de Pirate des Caraïbes?) est particulièrement mauvais, d'autant plus qu'il incarne un personnage incohérent. Systématiquement, il en fait trop et en rajoute sans la moindre parcimonie: hystérique, il a tout le temps la larme à l'oeil, il crie et verse dans le mélodrame à tour de rôle. Or le propre du psychopathe, c'est qu'il n'a pas d'affect. L'hystérie de Combo ne cadre pas avec son côté manipulateur/calculateur psychopathique (je pense notamment à son rapport avec Milky, le skin de couleur), car un nerveux fait n'importe quoi quand il perd le contrôle de ses nerfs, mais un manipulateur calcule froidement. N'ayant jamais vu d'autre prestation de l'acteur, je ne peux pas juger s'il est mal dirigé, trop habitué à des rôles de croque-mitaine, ou juste mauvais et excessif. Tout ce que je peux dire, c'est qu'il est mauvais quand il fait semblant de pleurer - à sa décharge, il est meilleur quand il joue le nerveux ou l'emphatique (à grand renforts de "fucking" et autres "fuck off").

Le ton mélodramatique du film, s'il est relativement efficace pour tirer des larmes au spectateur, n'en est pas moins pénible (la petite musique jouée au piano annonçant la couleur) et discrédite son impact final, déjà lourdement affaibli par tous les éléments cités ci-dessus. La fin en queue de poisson est carrément bâclée et elle met à nu les ficelles que le réalisateur a employées pour faire passer son message. La série-séquelle This is England '86 souffre globalement des mêmes défauts, même si elle reste distrayante en tant que fiction gentillette et folklorique. Je conclurai en citant une phrase extraite d'une critique du film parue dans le journal Le Monde: "le film fige dans le passé une réalité sociale qui continue pourtant de gangréner la Grande-Bretagne".


Dernière édition par H.N. le Mer 21 Oct - 23:04, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: - This is England -    - This is England -  EmptyLun 16 Jan - 9:21

"This is England [montre le sol], this is England [montre son coeur] and this is England!" [montre sa tête].

Une des seules scènes du film où Stephen Graham parvient à convaincre.
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