Nokturnal Mortum - The Voice of Steel
Oriana Music
2009
Nokturnal Mortum fait partie de mes groupes préférés grâce à la qualité de sa formule musicale, qui se caractérisait auparavant par l'alternance de trois types de passages:
- des interludes folkloriques joués avec des instruments acoustiques traditionnels, qui donnaient une excellente ambiance païenne et sylvestre
- des passages de black metal furieux extrêmement rapides, parfois épiques
- des passages de black metal symphonique majestueux
Malheureusement je n'ai guère suivi l'évolution du groupe à partir des années 2000, étant resté bloqué sur le monumental NeChrist et les magiques démos Lunar Poetry et Marble Moon. Le morceau (monumental) inclus sur la compilation The Night and The Fog volume 3 était le plus récent que j'avais entendu du groupe ukrainien. Devant l'enthousiasme des critiques, j'ai donc décidé d'acheter ce Voice of Steel en passant sur les sorties précédentes.
Pour commencer, le livret est indéchiffrable: les paroles et le titre de l'album sont intégralement écrits en runes, qu'il faut d'abord transcrire en alphabet cyrillique, puis traduire de l'ukrainien vers l'anglais. On laissera cette lourde tâche aux slavophones motivés...
La formation du groupe a été légèrement refondue, même si le trio de base reste articulé autour de Varggoth, Saturious et Vrolok. Outre un nouveau batteur et un nouveau guitariste, plusieurs invités assurent des parties de guitare, synthé ou des chœurs. Toujours dans les crédits, on peut lire (en anglais déchiffrable, heureusement) que l'enregistrement de l'album a duré 3 ans, entre 2006 et 2009.
Passons au contenu musical. Le groupe se tourne avec cet album vers ses racines nordiques, délaissant quelque peu sa marque de fabrique slave - qui est moins perceptible que sur NeChrist. Les compos sont de manière générale très mélodiques et accessibles à l'écoute. La production est propre, sans verser dans des sonorités purement commerciales. Disons juste que les petites flûtes sur fond d'accords acoustiques semblent calibrés pour la bande-son d'un film historique sur le Moyen Age.
L'infuence de Bathory période Hammerheart est criante sur les chœurs du premier morceau. Celle d'Emperor période Anthems... l'est également vers le milieu de l'album. Une nouvelle influence assez inédite fait son apparition: celle de Pink Floyd.
On ne retrouve pas les trois éléments cités dans l'introduction de cette chronique dans The Voice of Steel, qui sonne globalement comme un groupe de viking metal à consonnances d'Europe de l'est, additionnées à des influences floydiennes. Il est vrai que ces influences floydiennes sont très bien incorporées à la formule du groupe, mais on ne peut s'empêcher de penser à la tendance lancée par les derniers Enslaved. Nokturnal Mortum chercheraient-ils à se faire une place parmi les charts du metal, lassés de rester confinés dans un ghetto idéologique que leurs dernières déclarations semblent renier?
C'est la sensation que me laisse cet album, même si ma première écoute avait été favorable; un arrière-goût doucereux presque écœurant, qui réanime la nostalgie des œuvres-phares enregistrées par le groupe dans les années 90.
En outre, la déception que suscite chez moi The Voice of Steel tient aussi à la structure des compos, trop classique et systématique: une fois qu'on a mémorisé les riffs, il devient moins plaisant de les réentendre. Pourtant, pas mal de mélodies sont plutôt efficaces et plaisantes à écouter.
Bien entendu, The Voice of Steel reste largement au-dessus du niveau général de la scène black metal internationale de 2009, mais je ne peux m'empêcher d'apporter un bémol au chœur de critiques élogieuses qui portent l'album aux nues. Loin d'être un chef-d'œuvre, The Voice of Steel propose à mon avis un résultat en demi-teinte et une évolution glissante. Et puisque Nokturnal Mortum s'est désolidarisé du NSBM, je ne suis pas sûr de continuer à suivre leur parcours. Je n'aime pas le Coca Light... Ni le nationalisme politiquement correct et libéralo-compatible.